MA TENDRE ENFANCE


Chapitre VIII - CAQUETAGES ET BABILLAGES

2° Partie

Nous eûmes la joie de ne pas patienter trop longtemps ! La semaine suivante, lors de sa tournée matinale, le facteur nous apportait une lettre recommandée que ma mère récupéra en tremblant:

-" Je n'ose pas l'ouvrir, murmurait-elle en s'asseyant ... Mon Dieu, si c'était une chance pour nous ..."

-" Donne, lui dit Paul, je vais voir ! "

Gonflé par son importance il retira de sa poche le canif offert par mon père pour ses 5 ans ; celui-ci commençait à rouiller mais il s'en souciait fort peu ... D'un geste sec il fendit l'enveloppe et en retira une feuille dactylographiée et pliée en quatre. Je la lui retirai et lus, à haute voix, le contenu de la lettre . C'était une convocation pour le mardi suivant : maman devait être à Rennes à neuf heures, faisant partie des vingt quatre finalistes du jeu, son voeu ayant été retenu !

Ma mère sanglotait doucement, François sur ses genoux, Pierre appuyé contre son bras.

-" C'est magnifique, maman, nous les aurons nos poussins !"

Paul et Rémi sautillaient autour de la table en battant des mains ; je souriai à Francette qui me tomba dans les bras avec un sourire mouillé, les yeux pétillant de plaisir !

-" Tu mettras ta plus belle robe et ta veste blanche ... et tes chaussures à talon ... tu dois être la plus belle ... il faut réussir, lui dis-je !"

-" Ne nous emballons pas, Odile ! J'irai bien sûr ... mais, pourrai-je raconter mon histoire, c'est autre chose ! "

En effet, pour être la gagnante il fallait, en direct sur l'antenne et devant un jury réuni pour la circonstance, que la candidate explique les raisons pour lesquelles elle avait émis son voeu ! C'était difficile ! ... Maman s'exprimait avec facilité il est vrai mais, l'émotion aidant, comment s'en sortirait-elle ?

-" Tu as huit jours pour préparer tes réponses, c'est bien suffisant, lui assurai-je !..."

-" Nous verrons bien dit-elle d'un ton enjoué ... je ne laisserai pas échapper cette occasion ! ..."

Pendant une semaine, nous vécûmes dans la fièvre des préparatifs ... Maman pensait un peu à elle : elle lavait, repassait, écrivait, déchirait, recommençait ...

Nous n'avions qu'un regret : celui de ne pas posséder la T.S.F. pour écouter l'émission le jour de la finale !

Réunir l'argent du voyage fût aussi un problème : il fallait rogner sur l'indispensable, se priver un peu plus ! ... François, le plus petit, lui mit au creux de la main le billet de cinq francs, cadeau de son parrain, qu'il conservait comme un trésor depuis plus d'un an ! ... Nous étions heureux de lui donner ce que nous pouvions, avec nos faibles moyens mais, il s'avéra justifié que les petits ruisseaux font les grandes rivières lorsque, au jour "J", nous pûmes la mettre dans le train, le porte-monnaie vide à nouveau, mais le coeur si plein d'espoir ! ...

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